Situé à Kopèrè, secteur Dofily, dans la préfecture de Dubréka à une cinquantaine de kilomètres de Conakry la capitale guinéenne, le jardin botanique de l’Institut de Recherche et de Développement des Plantes Médicinales et Alimentaires de Guinée (IRDP-MAG) constitue un véritable sanctuaire pour les plantes médicinales guinéennes. Plus qu’un lieu de conservation, il est un outil stratégique pour la médecine traditionnelle, la recherche scientifique et la protection de l’écosystème, contribuant également à la lutte contre le changement climatique.

Pour Dr Ciré Diané, Directrice  Générale Adjointe de l’IRDP-MAG, l’institut allie savoirs traditionnels et recherche scientifique.Elle décline les objectifs de l’institut en ces termes :<< L’IRDP-MAG, comme son nom l’indique, s’occupe de la valorisation des plantes médicinales et alimentaires. Lorsqu’on est face à une pathologie, nous ne commençons pas par nos laboratoires ; nous allons d’abord vers les tradipraticiens et les guérisseurs pour comprendre comment ils conçoivent cette maladie. Nous recueillons les recettes qu’ils utilisent et, seulement après, nous analysons les plantes dans nos laboratoires pour identifier les molécules actives capables de traiter la pathologie. C’est un travail long et minutieux, mais c’est essentiel pour transformer le savoir ancestral en solutions scientifiques efficaces et vérifiables. Prenez l’exemple de l’hypertension, nous avons recensé les plantes auprès des guérisseurs et identifié une molécule efficace. Nous avons ensuite développé des microsphères et des phytomédicaments, comme Guinness HTA, disponibles dans les pharmacies. Le même processus a été appliqué pour le diabète avec le complément alimentaire Cetagas. Cela montre que notre travail ne se limite pas à la recherche fondamentale ; il a un impact direct sur la santé publique.>>a-t-elle expliqué.

Dr Diané souligne également l’importance de la formation des étudiants :<< Nous encadrons des étudiants en pharmacie, biologie, chimie, ainsi que des masterants et doctorants. Ils viennent apprendre à combiner tradition et science, et repartent avec une capacité à transformer le savoir sur les plantes en innovations concrètes. Cela contribue aussi à renforcer la recherche nationale et la protection de notre biodiversité.>>a précisé Dr Ciré Diané, DGA de l’Institut.
Il faut préciser que le jardin botanique de Kopèrè couvre une superficie de 32 hectares, dont 20 hectares de mangrove, 9 hectares de terre ferme et 3 hectares de prairie. Pour le Dr Jean Loua, ethnobotaniste à l’institut, ce site est un atout stratégique pour la recherche et la conservation :<< Nous avons mis en place ce jardin pour en faire une référence nationale. Notre objectif est de rassembler toutes les espèces du pays afin que chaque chercheur puisse entrer en contact avec des plantes qu’il n’a jamais vues physiquement. Ici, on peut observer, identifier, étudier et même reproduire des espèces menacées dans la nature. Cela constitue une base scientifique incontournable pour la Guinée.>>a expliqué Dr Loua.

Il présente également les défis de la conservation :<<La zone est très vaste et, historiquement, appartenait aux communautés riveraines qui venaient chercher du bois ou des plantes pour leurs remèdes traditionnels. Interdire l’accès n’est pas facile, et le jardin n’est pas totalement clôturé. Nous avons donc demandé à l’État de nous octroyer un périmètre sécurisé, mais la protection reste un combat quotidien. Notre message aux riverains est simple : accepter de préserver cet espace, c’est contribuer à la santé et à l’avenir de tous.>>
a-t-il plaidé.

Dr Loua met en avant les espèces phares étudiées dans le jardin :<< Nous avons travaillé sur le Misionorum bentanianum, connu pour ses propriétés antipaludiques, ainsi que sur Hymenocardia acida, et beaucoup d’autres. L’objectif est de conserver ces espèces tout en les rendant disponibles pour la recherche scientifique et la médecine traditionnelle. En protégeant ce jardin, nous protégeons à la fois les plantes et l’écosystème dont elles dépendent.>>nous a-t-il confié.

Pour le Dr Tanou Valdès Bah, pharmacien et doctorant, le jardin botanique représente un laboratoire naturel indispensable à ses travaux sur le cancer de la prostate :<<J’ai choisi l’IRDP-MAG pour pouvoir travailler sur les plantes médicinales et explorer leurs effets sur le cancer de la prostate. Depuis mon arrivée, j’ai pu approfondir ma réflexion scientifique et comprendre comment certaines plantes peuvent interagir avec les cellules cancéreuses. Le jardin botanique est crucial, car il me permet d’accéder à des espèces menacées qui ne sont plus facilement disponibles dans la nature.>>a précisé Valdès Bah.

Il insiste sur l’importance écologique et scientifique de ce lieu :<< Au-delà de la recherche médicale, le jardin botanique est un outil de préservation. Chaque plante que nous y implantons contribue à la sauvegarde de l’écosystème et de la biodiversité. Cela permet également d’avoir un réservoir génétique de plantes médicinales pour les générations futures, un véritable levier contre le changement climatique et la disparition des espèces.>>a-t-il conclu.

Il faut rappeler que le jardin botanique de Kopèrè joue un rôle écologique majeur. La mangrove, les prairies et les zones de terre ferme permettent de séquestrer le carbone, prévenir l’érosion des sols et maintenir la biodiversité locale. La préservation de cet espace contribue à la résilience face aux impacts du changement climatique tout en garantissant la préservation des ressources végétales pour les générations futures.

Joe ZOUM à Dubreka pour Radio Environnement

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