Les pays côtiers de la sous-région ouest-africaine sont aujourd’hui menacés par plusieurs facteurs dont le changement climatique, l’insalubrité, les pollutions et la construction d’infrastructures souvent « incontrôlées », doublée du non-respect et parfois l’inexistence d’études d’impacts social et environnemental.
Justement pour parler de ces infrastructures, leurs impacts ainsi que les mesures l égales et administratives, nous avons rencontré un expert du domaine. Dr Demba MARICO Coordonnateur de programmes, « gestion intégrée et résilience côtière » au PRCM, le partenariat régional pour la conservation marine.
Dr Demba Marico, merci d’accepter notre invitation, alors pour commencer quels sont les types d’infrastructures sur les côtes d’Afrique de l’ouest et quels sont leur impact sur le développement de ces pays ?
Merci pour cette opportunité, pour vous répondre je dirai qu’il y’a plusieurs types d’infrastructures qu’on peut citer. Il y’a les barrages, les routes, les infrastructures portuaires, agricoles, pétrolières et gazières, mais aussi hôtelières et touristiques etc…
Parlant de leur impact sur le développement de ces pays, s’agissant des barrages, on assiste à la réduction du volume d’eau douce, à la dégradation des terres humides côtières, à la baisse d’apport de sédiments de sables à la mer ou encore à l’accélération de l’érosion marine.
Concernant les infrastructures portuaires, on en a besoin pour développer nos pays certes, de recevoir des bateaux, de ressources, indispensables à nos populations, au développement de nos pays, c’est indéniable. Mais en même temps lorsque ces infrastructures ne respectent pas les normes, lorsque les études d’impact environnemental et social ne sont pas réalisés ou effectués dans les normes, engendrent un certain nombre d’impacts. Il y’a par conséquent, l’érosion côtière, qui va affecter les infrastructures, comme c’est le cas actuellement à Conakry, sans occulter la perte des plages et des dunes littorales dont les risques d’inondation.
Malheureusement dans la plupart des cas, des études d’impact ne sont pas réalisés dans les normes. On construit et après quand il y’a des impacts on essaye de trouver des solutions et cela coute très cher en termes de ressources et, nous mettons en danger notre vie et celles des générations futures.
Dr MARICO vous l’avez dit cette situation d’urbanisation le long des côtes est remarquable dans plusieurs pays de la sous-région et vous avez des projets dans ce sens, mais dites-nous si ces constructions continuent à ce rythme, que risquons-nous ?
Mettre en danger notre vie et celles des générations futures tout simplement. Nos Etats ne peuvent pas continuer à réaliser ces constructions anarchiques, ce n’est pas durable, et nous compromettions notre vie je viens de le dire. Ce que ces pays se doivent de faire, c’est de mettre en place des outils, des plans de planification, développement, des schémas en amont, qu’on sache par exemple, tel ou tel espace est réservé par exemple aux industries, aux habitats, à la nature. Il faut avoir des capacités d’anticipation, c’est important. Avec ces mesures, on peut éviter des zones inondables par exemple.
Concernant la Guinée où des infrastructures notamment hôtelières sont nombreuses que faut-il faire ? et vous avez également un projet qui va démarrer bientôt
C’est de prendre des mesures correctives pour gérer la situation qui se présente. Ensuite Il faut éviter de construire sans réaliser au préalable des études d’impact environnemental en amont, c’est-à-dire avant la réalisation des infrastructures. Je dois dire que ce n’est pas seulement la Guinée qui se trouve dans ce cas, la plupart de nos Etats ne réalisent pas des études d’impact environnemental et social dans les normes et cela pose problème je le disais tantôt.
Pour la Guinée, ce qui est le sens de votre question, actuellement nous avons un projet dans ce cadre sur les iles tristao. Ces études vont permettre aux autorités de bien évaluer les impacts sur le milieu et ce qui doit être fait au maximum, dans de telles situations pour atténuer les impacts de ces constructions.
Ce sont des études d’évaluation qui vont être lancées et qui vont permettre de savoir ce qui va se passer pour gérer au maximum les impacts présents et futurs des infrastructures, car dans sur ces iles il y’a de nombreuses infrastructures qui vont, ou qui sont déjà réalisées.
Vous avez aussi parlé de promotion d’infrastructures durables et intelligentes en termes de solutions, en quoi consistent-elles ?
Lorsque je parle de cela, je fais référence à la promotion d’infrastructures durables à travers une combinaison intelligente de plans de zonages qui intègrent les actions indispensables par exemple à la protection des sites de biodiversité et des écosystèmes littoraux critiques. Je pense aussi à la mise en place et surtout à l’application de mécanismes juridiques et réglementaires appropriés et opérationnels et des outils d’évaluation où les principes de prévention et de précaution fondés sur une connaissance scientifique avérée et des données fiables, sont mis en avant.
Pour terminer, quelles actions peuvent mener les médias et la société civile en général pour accompagner les Etats qui, je présume ne peuvent pas tout faire ?
Je suis d’accord avec vous, l’Etat à lui seul ne peut pas tout faire. C’est pourquoi je dirai que le rôle des médias est extrêmement important dans la promotion de ces infrastructures durables, respectueuses de l’environnement. Les Etats doivent avoir comme partenaires ces médias qui, à leur tour doivent relayer, vulgariser les textes juridiques en des termes accessibles, et promouvoir ces infrastructures durables.
Concernant les Etats justement, nous sommes en train d’élaborer un protocole additionnel qui entrera en vigueur à partir de 2020 sur la convention d’Abidjan adoptée par 22 pays africains. C’est la convention relative à la gestion intégrée de la zone côtière. Je précise que c’est une convention contraignante mais qui n’est pas encore entrée en vigueur. Donc nous sommes en train de rédiger un texte additionnel important qui sera contraignant pour nos Etats car actuellement, des textes contraignants justement font défaut.